La Maison de Bernarda de García Lorca est la pièce de théâtre du matriarcat absolu et de la négation totale de la liberté et de la femme. Lorca dénonce ces moeurs imposées par la religion et consenties parfois par les femmes dans une Espagne obscurantiste.
Dans un petit village andalou, vers le milieu des années 1930, Bernarda Alba, une femme d’une soixantaine d’années, crainte et respectée de tous, vient de perdre son mari et se prépare à huit ans de deuil, comme l’exigent la tradition et la bienséance qu’elle suit religieusement. Bernarda est aussi une mère tyrannique qui oblige ses cinq filles célibataires, pourtant adultes, à suivre à la lettre la moindre de ses consignes. Elles aussi portent le deuil et restent chez elles à longueur de journée. La propre mère de la maîtresse, la fantasque Maria Josefa, est mise à l’écart dans une chambre fermée à double tour.
Bernarda décide de marier l’aînée de ses filles, Angustias, à un jeune homme du village. Issue d’un premier mariage, celle-ci est aussi riche que laide. Appâté par sa dot, Pépé le Romano, un bel homme intriguant et peu scrupuleux, fier et sûr de lui, demande Angustias en mariage et obtient l’autorisation maternelle de parler à « l’élue », le soir venu, devant la grille de sa fenêtre.
Mais Pépé plaît à toutes les soeurs Alba et il prend vite l’habitude, une fois qu’il a rendu sa visite à Angustias de rejoindre, dans la nuit, la plus jeune soeur, la belle et séduisante Adela, qui l’attend dans la cour. Adela est convaincue qu’elle ne doit plus supporter les frustrations que sa mère lui impose.
Elle n’a pas envie de rester enfermée plus longtemps, mais elle ne perçoit pas la jalousie terrible de Martirio, une autre de ses soeurs, également amoureuse de Pépé et qui la surveille.
Finalement, Adela ne peut empêcher que ses rendez-vous nocturnes avec Pépé ne soient découverts et elle se décide à révéler l’amour impossible au grand jour, devant toute la famille.
Bernarda sait qu’en tant qu’autorité elle doit sortir indemne de cette histoire, si elle veut maintenir son pouvoir. Pour devancer les réactions des villageois et garder la face, elle chasse Pépé le Romano en tirant sur lui à la carabine. Mais Adela, craignant de ne plus jamais revoir son amant, crie à tout le monde qu’elle ne se soumettra jamais aux volontés de sa mère. Elle s’enferme dans une
chambre et se donne la mort. Face au drame, Bernarda impose le silence à tout le monde.
Alexandre Païta dans une mise en scène au cordeau, servi par des comédiennes impliquées et formidables de talent, exacerbe une atmosphère irrespirable, toxique, née de la tradition délétère. Ce premier degré, violent et pédagogique, surdétermine le sentiment de finitude, d’impasse et de mort. Tout sauf le déshonneur, la mort n’est rien à côté de la non-soumission aux apparences ! Lorca a-t-il écrit une pièce misogyne ? Ou plus justement, n’a-t-il pas dénoncé une constante de l’histoire humaine : pourquoi les hommes luttent-ils pour leur propre mort comme s’il s’agissait de leur salut ? Tout dans la démarche esthétique d’Alexandre Païta nous ramène à cette question que posa naguère La Boétie : « il n’est point de tyran, il n’est que des esclaves… »
MAX TRÉBOSC JOURNALISTE
Radio Clapas, juin 2021 – Région Roussillon-Midi-Pyrénées, 34-France
Mon week-end à Genève. Tribune de Genève, Samedi – dimanche 21 – 22 décembre 2019
Tribune de Genève,
Mardi 26 août 2014
Desenvolvido por GoDaddy